Revue 94, octobre 2016. Interview par Laurence Madiot.
Nous avons pu discuter un peu avec Rafaël DIGIANO, Argentin, juge connu, reconnu à l’international, président du CSA argentin, affixe de CACCIATORE. Pour la 1ère fois ce Printemps, l’Argentine a participé aux championnats d’Europe. Rafaël en faisait partie. Je vous relate ci-dessous notre conversation.
LM : tu es Président du club argentin du setter anglais. Depuis quand?
RD : Depuis 2005. Il est important de générer une certaine émulation et aussi de pouvoir organiser des
concours. Il y a 40 adhérents dont une vingtaine d’éleveurs. Cela peut vous paraitre très peu. C’est vrai. Mais il faut bien commencer et ces 40 adhérents sont très actifs, tous intéressés par la race et TOUS sont axés sur le travail. Nous avons environ 200 à 300 naissances par an.
Nous tentons de former des jeunes pour les mener au plus haut niveau.
Nous voulons faire découvrir les SA par tout bon moyen. Il y a 6 expositions par an organisées par la FCA pour le SA. Nous voulons montrer ce qu’est un SA en fonction du gout de chacun mais toujours dans le style, la mécanique, l’intelligence du SA.
Enfin, nous cherchons à aller à l’international. C’est primordial à mon sens. Les échanges sont indispensables.
L’Argentine a des terrains et des perdreaux très différents*. Seul le club peut former des équipes de chiens et montrer ce qu’ils savent faire. C’est le club qui nous a permis de participer aux championnats d’Europe (puisque l’Argentine fait partie de l’Europe….(sourire))
J’essaie d’établir des échanges avec des pays comme le Chili et le Mexique pour une homogénéité en Amérique du Sud. Nous allons organiser une « classique » cette année, la coupe sud america qui a déjà été organisée en…1980.
LM : Tu parles d’organisation. Comment est elle faite en Argentine ?
RD : La FCA (Fédération Cynologica Argentina) est l’équivalent de la SCC, avec les mêmes prérogatives,
amis avec moins d’affiliés, bien sûr.
Elle organise notamment la coupe d’Argentine pour nos chiens d’arrêt et la coupe d’Amérique pour la première fois cette année. Elle va ainsi réunir britanniques et continentaux. Les années précédentes, la coupe d’Amérique était organisée par les clubs de race. L’Argentine est le seul pays qui organise des concours sans le contrôle de la FCI.
En dehors de ces 2 manifestations très importantes, ce sont les clubs qui organisent les concours. Il y en a environ 12 et seulement au Printemps. Les disciplines de GT, GN ou GS n’existent pas en Argentine. En +, des derby sont organisés : 1 pour les SA, 1 pour les pointers et un autre pour les britanniques, mais ce dernier est réservé aux Argentins.
Il existe également des épreuves pour les jeunes, jusqu’à 24 mois, ce qui correspond à vos TAN. Cela a été mis en place en 2014. C’est donc tout récent.
LM : Et les titres ?
RD : Il y a des concours solo avec CAC, sans IT 3 CAC de solo avec 3 juges différents donnent un titre
de champion argentin de travail.
2 CAC en Quête de chasse en couple donnent le titre de champion de quête de chasse
2 CAC en Grande quête donnent le titre de champion de Grande quête
Un TB en Spéciale de race en standard est exigé quelle que soit la discipline pour homologuer le titre.
LM : Et toi, Rafa, quel est ton parcours ?
RD : J’ai eu un pointer il y a 25 ans. Je me suis penché sur son dressage en lisant quelques livres et suis tombé sur une revue qui parlait de SA, puis une vidéo et le livre de JM Pilard. Je me suis donc davantage intéressé aux SA, ce que je ne regrette bien sûr pas car ce sont des chiens très attachants…
Et puis, j’ai rencontré une personne qui faisait une compétition. Et un dimanche, je me suis décidé à présenter YIYA Maria Andrea de Iketown en 1990, d’ailleurs devenue championne par la suite. Cela met un bon pied à l’étrier… J’ai fait une portée avec un chien que j’avais choisi pour améliorer les allures et la mécanique, en prenant exemple sur l’Europe. J’ai eu de cette première portée DEA de CACCIATORE, première championne de travail de mon affixe.
En 1999, je suis venu en France pour la Coupe d’Europe. Ma passion s’est amplifiée. En Septembre 1999, je suis devenu juge de Setter anglais, puis de pointer. En Argentine, on ne peut juger les races qu’avec l’autorisation de chaque club de race.
Aujourd’hui, je tiens absolument à ce que les chiens argentins participent aux épreuves internationales et je me dois d’être représentatif de nos chiens !
LM : Qu’as-tu pensé des championnats organisés par la France cette année ? (terrains, oiseaux, organisation ?)
RD : Les terrains, monoculture, facilitent l’évolution des chiens. Les terrains sont plats, sans pierres, les allures se voient bien. Tout se voit d’ailleurs !, contrairement à l’Espagne par exemple où les terrains sont souvent très vallonnés. En Serbie, il y a plus de perdreaux, mais les terrains sont plus difficiles à négocier et ne permettent pas toujours au chien de s’exprimer. La quête doit être plus mécanisée et les terrains très cadrés vont à l’encontre des remontées d’émanation et les oiseaux sont presque trop nombreux. Quel que soit le terrain, l’essentiel est de voir un chien qui fonctionne bien partout. En
France, il y a suffisamment d’oiseaux, peu de lièvres. La France a sa place dans les organisations de la Coupe d’Europe. Elle est idéale pour voir les chiens, ce qui est indispensable pour l’apprécier à sa juste valeur.
LM : Et nos chiens français ?
RD : Ils ont sans contestation possible des qualités de chasse qu’il est intéressant d’aller chercher et qu’il faut conserver. Quand les qualités d’une tête bien faite et de nez sont là, il est plus facile d’améliorer les allures. L’inverse me parait plus compliqué…
LM : Un grand merci, Rafa, pour ces quelques confidences. Nous souhaitons bonne chance à tes
jeunes setters comme BEST OD POSTARA et OLIVER DE CACCIATORE.
*Les terrains sont des grandes, très grandes étendues de prairies, à pertes de vue, de la pampa. Les perdreaux communs, appelés Perdiz chica (Nothura Maculosa), sont plus petits que nos européens, entre caille et perdrix grise. Ils existent dans une grande partie du pays, avec 7 variétés et volent rarement en couple, seulement au Printemps. Le mâle, plus petit, couve les oeufs.
L’autre variété est la « colorada » (Rynchotus Rufescens), plus grosse, ressemble davantage à un faisan et piète beaucoup. Ce n’est qu’en cas de froid qu’on les voit dormir ensemble. Elle a un sifflement fort et mélancolique.
Sa chasse est interdite, mais elle peut servir à l’entrainement, car elle est difficile à travailler.
Composition de l’Equipe d’Argentine au Printemps dernier :
Grande Quête : DIABLO DE DON MARCOS à Borselli (chien français)
KOBOS DEL CACCIATORE à Marita
ACERO DEL CACCIATORE à Moreno
AIDE DE SIENA à Mele
COMETA DEL CACCIATORE
Quête de chasse : FLECOS DE DON MARCOS à Borselli (chien français)
Laurence MADIOT