Revue 108, 1er semestre 2023. Un article de Philippe Ruault.
Qu’est-ce qu’un concours d’automne ?
C’est un concours de chasse pratique sur faisans ou perdreaux lâchés avec prélèvement suivi d’un rapport. Critiqués par beaucoup
de trialisants et dénigrés par bon nombre d’amateurs, en un mot, considéré comme un championnat de 2ème catégorie, pourtant cette épreuve est celle qui se rapproche le plus de la chasse et qui a mon sens mérite toute sa légitimité en tant qu’éleveur même si bien évidemment elle ne DOIT pas être la seule dans la sélection de nos setters.
Quelle en est la facilité ?
Sa préparation puisqu’il est possible d’entraîner sur tout le territoire(enclos ou territoires de chasse en période d’ouverture) et avec du gibier d’élevage à disposition.
Quelles en sont les difficultés ?
Contrairement aux idées reçues, les difficultés sont énormes :
Nous aurions tendance à dire : « ce sont des cocottes, ceci est de la rigolade », la réalité en est tout autre. Je parlerai simplement
du chien pour gagner et mettrai de côté le chien présentant des aptitudes moyennes ; on entend souvent dire avec dénigrement :
« Il est limite, mettez-le en Gibier Tiré ».
De ces chiens là nous les trouvons dans toutes les disciplines, ceux qui sur les épreuves de printemps arrêtent plus l’émanation que
les perdreaux et finissent par se classer parce que par chance, un perdreau vole, sans parler de ceux qui à la bécasse finissent par en arrêter une avec bien souvent des appuis à l’envol similaires aux plaquages du XV de France !
Pour gagner il faut que le chien ait :
- Une adaptation très rapide au terrain car lors de la saison il sera amené à concourir sur des biotopes différents : plaines, bois,
causse… - Une mise en place qui doit être immédiate avec un rythme élevé et souvent sous la chaleur
- Une quête parfaitement réglée
- Un arrêt en style suivi d’un coulé typique de la race
- Une sagesse à l’envol et au (x) coup(s) de feu, le tout suivi d’un rapport à l’ordre
- Pour le couple, un patron spontané.
Sur le papier c’est très simple et pourtant …
La quête pour beaucoup de chiens n’est pas un obstacle, cela se complique lors de la prise de point car si arrêter un faisan ou un
perdreau est une chose, savoir le négocier à l’ordre est beaucoup plus complexe comme rester de marbre à l’envol avec souvent
plusieurs coups de feu et rapporter dans la foulée.
Pourquoi ?
Le setter, comme tout chien de chasse, cherche le gibier avec passion, sa singularité réside dans la négociation de l’oiseau ;
Quand il rentre dans le cône d’émanation, il doit devenir très félin tout en s’approchant doucement du gibier avant de l’arrêter.
La sagesse à l’envol et au feu ternissent souvent cette qualité car bien souvent nous essayons de l’obtenir trop vite et ce qui engendre des coulés difficiles ! Si dans beaucoup d’autres épreuves de travail, le coulé est rarement à faire, en gibier tiré, il est nécessaire dans la majorité des situations.
Le rapport s’effectue à l’ordre du Juge, rapporter un faisan souvent un gros faisan bien lourd en fin de parcours peut s’avérer compliqué.
Tout ceci décourage plus d’un conducteur et comme tout bon français au lieu de dire « C’est trop de travail, je n’y arriverai pas »
cette discipline est dénigrée « C’est des Cocottes » et on sauve ainsi son honneur de préparateur-dresseur.
Alors comment faire un champion d’Automne me direz vous ?
Le temps sera votre allié.
En premier lieu, vous devez travailler :
- La quête pour qu’elle soit la plus efficace dans la recherche
- La fermeté de l’arrêt,
- Le coulé
- La sagesse sans se préoccuper du rapport. Certains commencent par le rapport, à chacun sa méthode, seul le résultat compte.
Cette séquence vous prendra 2 à 3 mois.
En second lieu, vous travaillerez le rapport. Une période de 2 mois est la règle de temps pour que votre chien l’apprenne.
Votre chien a maintenant compris la quête, la sagesse et le rapport à froid, maintenant il va falloir tout assembler. Il faut compter
environ 1 mois et là je vous garantis que vos nerfs vont être mis à rude épreuve entre les départs précipités au coup de feu, les refus de rapports à chaud. Il faudra répéter, répéter, répéter en trouvant le juste équilibre entre
la fermeté et la douceur ; Jean-Marie PILARD disait « Une main de fer dans un gant de velours », c’est tout à fait ça.
Après toutes ces leçons, ces répétitions, vous aurez peut-être après 6 à 8 mois de travail votre CHAMPION.
En conclusion à quoi sert cette épreuve d’automne ?
Dans la logique, les épreuves d’utilisation sont faites pour trouver de grands géniteurs qui sont susceptibles de produire d’excellents chiens de chasse. Les épreuves d’automne démontrent une grande capacité à assimiler un dressage poussé, tout en ayant une grande passion de la chasse ; C’est bien ce que recherche les chasseurs. À ceux qui pensent que l’on ne voit pas bien le style dans les biotopes couverts, je les rassure, nos Juges sont suffisamment compétents pour attribuer la récompense suprême qu’à des chiens de valeur. Et à tous ceux qui persistent et dénigrent ces épreuves, la critique sans pratique n’a aucun sens…